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La Romance de Ténébreuse de Marion Zimmer Bradley

Editions Pocket

Un astronef s'écrase sur une planète inconnue. Les survivants – des pionniers que le vaisseau transportait vers une colonie lointaine – pourront-ils le réparer et repartir vers leur destination initiale ? Ils devront reconstruire les machines nécessaires à partir des matériaux locaux, au risque de détruire l'écologie de la planète.
Certains veulent s'établir sur place et s'adapter à cet environnement étrange. Mais voici que se lèvent des vents apportant avec eux des pollens aux mystérieux pouvoirs. Les hommes de la planète Ténébreuse ne seront plus jamais les mêmes...

 

Avis de Cyllan :

Avant de vous livrer mon avis, faisons le point sur ce qu'est cette saga de science-fiction / fantasy. La Romance de Ténébreuse, c'est une vingtaine de romans (dont les premières publications s'étalent sur trente ans), tous situés dans le même univers mais pas toujours à la même époque. Il est possible de lire certains tomes dans le désordre, les histoires étant différents d'un livre à l'autre (du moins, au début « chronologique » de la saga).
    Il y a différents ordres possibles : la chronologie de l'histoire globale ou la chronologie des dates de parutions. J'ai préféré suivre l'ordre historique pour une meilleure compréhension, selon moi. (Et aussi parce que les intégrales publiées aux éditions Pocket ces dernières années sont organisées de cette manière.)
    Voici les titres publiés en France (entre parenthèses, le numéro de l'intégrale associée, à savoir que l'intégrale III et IV se déroulent dans la même période) :
    •    La Planète aux Vents de Folie (I)
    •    La Reine des Orages (I)
    •    La Belle Fauconnière (I)
    •    Le Loup des Kilghard (II)
    •    Les Héritiers d'Hammerfell (II)
    •    Redécouverte (II)
    •    La Chaîne Brisée (III)
    •    L’Épée Enchantée (IV)
    •    La Tour Interdite (IV)
    •    La Maison des Amazones (III)
    •    La Cité Mirage (III)
    •    L’Étoile du Danger (IV)
    •    La Captive Aux Cheveux de Feu (IV)
    •    Soleil Sanglant (V)
    •    L'Héritage d'Hastur (V
    •    Projet Jason (V)
    •    L'Exil de Sharra (VI)
    •    Les Casseurs de Mondes (VI)
    •    La Chanson de l'Exil (VI)
    •    La Matrice Fantôme (VII)
    •    Le Soleil du Traitre (VII)

    Tout cela s'organise en « sous-cycles », couvrant la colonisation (le premier tome), les Âges du Chaos (tomes 2 à 5) et la redécouverte, avec notamment la trilogie des Amazones Libres, l'Âge de Damon Ridenow et le temps des Comyn.

    L'histoire, en gros, c'est quoi ? Un classique de SF, un vaisseau spatial, parti coloniser d'autres planètes par manque de place sur la Terre, qui s'échoue sur une planète inconnue,ici Ténébreuse. Ce monde est plutôt hostile, avec ses gigantesques chaînes de montagnes et son soleil sanglant. N'ayant quasi aucune ressource, il est impossible aux terriens de réparer le vaisseau et ils ne peuvent contacter personne : ils vont devoir survivre là où ils sont. Voilà le premier roman.
    Plus aucune technologie n'étant disponible, ils vont peu à peu retourner à un style de vie Moyenâgeux. Particularité de cette planète ? Certains de ces habitants ont des facultés psy assez développées. Avec le temps et les croisements entre locaux et terriens, ces pouvoirs vont se retrouver dans leurs descendances qui vont peu à peu oublier totalement leurs origines terrestres. On se retrouve des centaines d'années après, dans le deuxième tome et on quitte un peu la SF pour se tourner vers la fantasy. La suite de la saga nous décrit la vie sur Ténébreuse : guerres de royaumes et de pouvoirs, sélection génétique...tout va au plus mal avant qu'un accord soit passé pour rétablir un semblant de paix : ce sont les Âges du Chaos.
    On fait un bond de quelques siècles et on arrive à la redécouverte de Ténébreuse par les Terriens : choc culturel des deux côtés, entre une colonie perdue finalement retrouvées d'un côté, et la découverte des origines de l'autre. Terriens et Ténébrans devront apprendre à se connaître et vivre ensemble, tout en préservant leurs secrets respectifs. Ténébreuse devra choisir entre s’intégrer pleinement à l'empire colonial Terriens énorme, ou bien se battre pour garder son identité propre.

    J'ai eu un peu de mal à débuter la lecture de ce premier tome, très SF, n'ayant jamais lu ce genre avant. Et on ne peut pas dire que ce soit le tome le plus intéressant de la saga. Au final, j'ai trouvé qu'il ne se passait pas grand chose, que c'était plutôt plat. Je suis quand même allée au bout de ma lecture, pour avoir le décor de l'histoire à venir pleinement posé. Ce fut donc un choc quand j'ai entamé le tome deux, qui se passe des centaines d'années plus tard : plus le même style de vie, des origines oubliées et surtout, le style d'histoire totalement différent pour moi : on passe de la SF à la fantasy ! Je n'ai, honnêtement, pas réussi à rentrer dans cette suite et j'ai laissé tombé...pour y revenir quelques années plus tard.
    Six ans plus tard (à une vache près), j'ai eu envie de retenter l'expérience, qui fut cette fois concluante ! 7481 pages plus tard, je finissais d'une traite (mais en quelques mois tout de même) cette superbe saga.

    Le point qui m'aura probablement le plus marqué, c'est qu'on a souvent à faire avec un personnage principal féminin, évoluant dans une société patriarcale et tentant de s'en démarquer, s'en sortir. Casser les codes et faire évoluer les mentalités de la planète, voilà les motivations de ces femmes de pouvoir. Et ce fait se comprend quand on lit la biographie de l'auteure : une féministe dans l'âme ! Et drôlement en avance sur son temps, je trouve, quand on sait que ses bouquins sont sortis aux débuts des années 60. Par exemple, 'homosexualité, tant féminine que masculine, y est abordée à de nombreuses reprises, sans jamais s'y attarder (ce n'est pas le sujet de ces livres, c'est juste un fait, tout comme les arbres sont verts et la neige est froide).

    Nous avons donc ici une représentation d'une société plutôt vieillotte, patriarcale et les personnages principaux, hommes comme femmes, vont se rebeller contre ça, vont vouloir que leur société évolue. Mais une évolution raisonnée, dans le bon sens. Quand la technologie apportée par les terriens vient sur Ténébreuse, les Ténébrans ne vont pas y céder d'un coup (alors que leurs vies en seraient améliorées) mais vont plutôt emprunter ce qui peut leur être utile. Tout en gardant leur mode de vie, leur culture. J'ai trouvé dans ce récits pas mal de ressemblances avec notre monde actuel (le retour aux produits plus sains, plus naturels, le mouvement féministe...) et qui m'a fait me pencher sur certaines questions (oui, oui ! J'vous jure!)

    Pour ce qui est de la partie vraiment « fantasy », nous avons à faire ici à des pouvoirs psy, le laran, plus ou moins développés avec l'aides de matrices, sortes de pierres qui permettent de décupler les ondes cérébrales à l'origine de ces pouvoirs. J'ai vraiment adoré tout cet aspect mêlant à la fois sciences et imaginaire (par exemple, pour extraire les quelques rares métaux de la planète, ils doivent d'abord comprendre sa structure au niveau atomique, pour pouvoir ensuite la détecter mentalement, parmi tout le reste, et l'extraire jusqu'à la surface grâce à d'énormes matrices).
    Ce laran est une particularité génétique résultant de croisements entre colons et peuple originel de Ténébreuse. Tous ne l'ont pas et il a bien failli mener à la perte des Ténébrans. Par des croisements consanguins afin de créer des lignées (=les grandes familles au pouvoir) les plus pures possibles (les méfaits de l'eugénisme bonsoir!), ils n'ont réussi qu'à affaiblir les pouvoirs qu'ils tentaient de sauver et mener au déclin. J'ai aimé suivre l'évolution des mentalités des Tours, lieux où se fait l'apprentissage du laran (et le travail sur des matrices géantes, permettant la communication sur tout la planète entre les tours relais, ainsi que l'extraction des métaux). On commence avec l'apogée des Tours, avec les laranzu (les Gardiens aka les maîtres du savoir) qui font frôler la destruction de l'espèce avec leurs terribles armes, jusqu'à ce qu'un pacte soit passé pour réduire l'utilisation des pouvoirs. S’enchaîne alors une perte des connaissances, un mode de vie extrêmement strict pour éviter tout débordement. Puis des recherches vont mener à de nouveaux savoirs, de nouvelles utilisations plus justes et plus raisonnées des pouvoirs. Faits qui, encore une fois, sont un peu le miroir de notre histoire à nous (le temps des grandes civilisations, la période obscure du Moyen-âge et les sciences modernes).
    
    Voilà pourquoi j'ai adoré cette saga : Marion Zimmer Bradley s'est inspiré de notre passé, l'a remanié à sa sauce SF/Fantasy et nous livre sa vision d'un potentiel futur, ce qui m'a fait réfléchir. Et un livre qui te fait réfléchir, c'est un livre réussi, non ? En tout cas, j'ai découvert l'univers de cette auteur et je compte bien lire d'autres de ses œuvres.

    Mention spéciale à la trilogie des Amazones Libres (leur serment est une ode à la liberté de la femme et à son égalité avec les hommes), qui combine personnages principaux féminins plutôt badass, redécouverte de la planète par les terriens et apprivoisement de l'autre au cours de quêtes dans les tréfonds des montagnes.

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